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Santé économique et financière dans les pays occidentaux
16 février 2016

Pétrole,crise bancaire,économie réelle: dix ans pour sceller le sort d'un système économico-financier

Source : LEAP 2020

Il y a dix ans, dans son numéro de février 2006, LEAP alertait sur le déclenchement "imminent" d'une crise systémique globale, se fondant sur deux signes forts : la fin de la publication de la masse monétaire M3 (suggérant la mise en route à des degrés inhabituels de la "fameuse planche à billets verts" dont on a plus arrêté d'entendre parlé depuis); et le lancement par l'Iran - non encore contraint par les sanctions internationales - d'une bourse du pétrole en euro.

Ces deux signes forts permirent d'affirmer que quelque chose d'énorme se préparait qui allait questionner les fondements du système dans lequel le monde économico-financier vivait à l'époque, soit le système pétrodollar et de l'argent-dette.

Pour ce qui est de la masse monétaire, les choses ont bien tourné autour de ce thème depuis dix ans. La mise en route de cette "planche à billets" que les américains avaient souhaité discrète en cessant de publier M3, a bientôt dû être officialisée via les gigantesques QE de la FED, puis arrêtée, tout d'abord relayée par les QE alliés qui ne tarderont pas à ralentir également. Suite et fin de la tentative de maintenir artificiellement la suprématie du dollar via l'inondation planétaire de cette monnaie; suite et fin du système d'endettement comme moteur de croissance.

Concernant le vente du pétrole iranien en euro, attaque majeur d'un non-aligné sur le système pétrodollar, il est particulièrement intéressant de mettre bout à bout : l'annonce par l'Iran du lancement de cette bourse en pétro-euro début 2006, du déclenchement des sanctions internationales contre ce pays en juillet 2006 qui a en partie fait avorter le projet puis les énormes attaques contre l'euro via la Grèce à partir de 2009, qui ont permis au dollar de reprendre un lustre qui avait terni en 2008.

Il est encore plus intéressant de noter que la crise de la dette grecque (bien que non résolue) est enfin laissée de côté par les médias, qu'aussitôt libéré de ses sanctions l'Iran annonce la vente de son pétrole en euro...et que le lendemain la Deustche Bank est attaquée de toutes parts.

Le vrai "game-changer" pour la suprématie mondiale du dollar, c'est l'euro en fait. Car l'euro était bien évidemment la première monnaie à concurrencer directement le statut d'unique monnaie de réserve internationale du dollar. Et lorsque l'on regarde, rétrospectivement pour une fois, la séquence d'évenements ci-dessus, on ne peut s'empêcher de se dire que la vraie guerre qui a eu lieu ces dix dernières années aura été une guerre entre les Etats-Unis et l'Europe. Guerre pendant laquelle le yan, les BRICS, la New Development Bank, et tout un système alternatif au système occidental, a pu avancer tranquillement pendant que l'Occident se déchirait silencieusement.

Si l'on compare maintenant ce qu'il s'est passé en 2007/2008 lorsque la crise a officiellement commencé et ce nouvel épisode qui inquiète tant la planète finance, une image de la crise sur dix ans s'impose à nous : les chutes qu'ont connues les valeurs au début de la crise furent gigantesques et le système a été près de s'effondrer complètement. D'une certaine manière, le processus d'effondrement donne l'impression d'avoir été arrêté juste avant de toucher le sol; c'est ainsi qu'il ne s'est pas vraiment cassé : un crash avorté en quelque sorte.

Et le fait est qu'à l'époque, personne n'avait intérêt à ce que le système se brise, tout simplement parce que rien n'était encore prêt pour le remplacer. Et donc : arrêt sur image...pendant dix ans !

Dix années durant lesquelles tout le monde a travaillé...pour le meilleur et pour le pire : les chinois ont recentré leur économie et se sont préparés à l'inévitable transition du statut d'atelier du monde à celui de puissance économique à part entière, les BRICS se sont organisés et ont crée les outils de nouveaux mécanismes de financement et de gouvernances internationaux , les États-Unis d'Obama ont contribué à débloquer de gros verrous qu'avaient posés les États-Unis de George W.Bush ( au premier rang desquels les sanctions contre l'Iran), les russes se sont positionnés en contre-pouvoir géopolitique, les États-Unis du Pentagone ont reculé de beaucoup d'endroits dans le monde mais ont avancé sur le territoire européen considéré comme devant impérativement rester dans le giron, les puissances financières ont bloqué la plupart des projets de régulation susceptibles de les affecter...mais pas tous, quant aux européens, l'euro a résisté et le découplage avec les États-Unis a tout de même progressé même si une vraie gouvernance de la zone est toujours en attente (...de référendum britannique -1-) ainsi qu'une Europe de la défense.

note -1-: (Depuis que le Royaume-Uni a adhéré à la Communauté européenne en 1973 aux conditions exorbitantes que l'on sait pour l'Europe, ses dirigeants n'ont cessé de reconduire ad nauseam la stratégie de Margaret Thatcher fondée sur le prédicat suivant : "Vous avez besoin de nous mais nous ne voulons pas de vous, donc vous faites comme on dit"..).

Bref, si, il y a huit ans, le système ne pouvait se briser sans entraîner l'ensemble de la planète dans une gigantesque catastrophe, on peut considérer aujourd'hui que beaucoup de choses sont prêtes à "réceptionner" l'économie planétaire lorsque l'ancien système effectuera les derniers centimètres qui le séparent du sol et de l'écrasement.

La crise bancaire occidentale, inévitable suite au choc de l'effondrement des cours du pétrole en dollar, fait trembler la planète finance. Cela a commencé en Chine, mais ce qui tremblait en Chine n'avait rien de spécifiquement chinois : c'était bien la partie chinoise du fameux système financier occidentalo-centré. Et désormais en effet, c'est déjà remonté vers l'Europe...

Lorsque les maîtres du xxè siècle sont venus s'échouer à l'orée du xxiè sur les côtes du "nouveau monde" , ils ont assez vite compris les horizons nouveaux ouverts par les puissances émergentes. L'ancien "tiers-monde", puis "monde en voie de développement", désormais appelé "émergeant" alors qu'il est en fait "émergé" se déployait sous les yeux éblouis. Les États-Unis en particulier, mais l'Europe également, en tant que club dominant jusque-là, se sont tout d'abord frotté les mains à la perspective des marchés prodigieux qui s'ouvraient à eux

Toute l'économie occidentale s'est alors lancée à corps perdu dans un projet général d'investissement mirifique dans le but de se préparer à honorer la demande gigantesque qui allait les submerger. Les prêts ont été consentis, forts de perspectives de retour extraordinaires. Des milliards de dollars ont ainsi été imprimés par les banques privées, créant une exorbitante richesse numérique de valorisation par anticipation dont personne ne doutait qu'elle deviendrait vite de la vraie richesse.

(la monnaie-dollar est passée du'une monnaie appuyée sur l'or, à une monnaie appuyée sur le pétrole, puis l'ultra-financiarisation l'a en réalité fait passer à une nouvelle étape : la "monnaie-valeur anticipée" . En effet, lorsqu'une banque privée crée de la monnaie pour financer un projet, elle anticipe que cette avance créera la richesse anticipée et que la monnaie restera ainsi connectée à la réalité économique. Et le fait est que dans une économie croissant à un rythme régulier, l'argent reste ainsi en effet de l'argent.

Mais si, à un moment de l'histoire, un optimisme délirant s'empare d'un système économique sur une anticipation fausse de taille planétaire, l'argent devient de la dette, de la "vraie" cette fois.

Le problème de l'Occident, c'est qu'il avait omis de comprendre que les nouveaux marchés correspondaient aussi à une nouvelle concurrence et que ses entreprises ne seraient pas les seules bénéficiaires de la manne. Cette magistrale erreur d'anticipation s'est vue pour la première fois en 2007 et la crise des subprimes fut celle du petit bout de la chaîne alimentaire du système financier : les particuliers, qui s'étaient vu octroyer des prêts personnels le plus facilement du monde dans ce fameux contexte d'enthousiasme délirant sur les perspectives économiques générales.

Huit ans plus tard, c'est l'autre bout de la chaîne en question qui prend feu : toute l'économie née de cet endettement s'effondre et les banques par qui le crime est arrivé sont finalement obligées d'acter l'irréalité de leur valorisation. La crise des CDS et de tous ces produits qui ont facilité le prêt à outrance à partir de la fin du siècle dernier partent en fumée : évaporation des actifs-fantômes, comme anticipé il y a longtemps...10 ans pour y arriver, dix ans pour boucler la crise !

Cette description peut paraître effrayante, néanmoins on peut continuer de penser que le "hard-landing" sera un landing salutaire même si des catégories d'acteurs y laisseront leur peau, que le monde a eu dix ans pour se préparer à cette issue qui est une solution, que les banques ne feront sans doute même pas faillite ou très peu le feront parce que les États ou entités supra-étatiques sont également en position de reprendre en main les choses contrairement à il y a dix ans, que de nouvelles dynamiques économiques sont déjà là et que des systèmes politiques à nouveau aux commandes ne seront pas longs à le repérer, à les encadrer, à les comptabiliser, à les taxer et recréer de la richesse collective avec, etc...

L'industrie du pétrole de schiste est un cas caractéristique de cette folie d'endettement : les réserves de pétrole ainsi inventées sont actuellement peu à peu effacées puisqu'elles ne seront jamais pompées; elles ont pourtant existé dans les bilans des entreprises (en emprunt) et de ceux des banques ...évaporation d'actifs fantômes..!

Nous voyons que toute d'industrie du transport de fret est en danger ! je vous ai souligné que l'indice Baltic Dry Index n'a jamais été aussi bas..;nous verrons que le BTP qui valorise actuellement des milliards de bénéfices dans les pays émergés est en train de faire un fausse valorisation. Nous verrons que les Monsanto et autres chimistes de l'agro-alimentaire vont avoir de gros problèmes...sous le coup aussi des effets de la COP21 et de la reprise en main du monde par le politique....(Souhaitons que le caractère démocratique de cette reprise en main par le politique demeure !).

 

 

 

 

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