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Santé économique et financière dans les pays occidentaux
5 juin 2014

Crise de la gouvernance européenne : divorce dirigeants/peuples (4)

De la démocratie au démocratisme

Si le mot "démocratie" est utilisé à tout bout de champ, c'est de facto dans une déconnexion complète entre les peuples et élites politico-administratives que nous entraînent les évolutions actuelles. En effet, sur de nombreux points, les peuples dérangent maintenant ces élites :

- tout d'abord, la déconnexion n'est pas récente et le transfert des compétences au niveau européen qui n'a pas été accompagné du transfert des pouvoirs politiques cristallise depuis le Traité de Maastricht le divorce entre élites et peuples ;

- depuis 2008, la crise renforce encore ce sentiment d'impuissance des citoyens européens face aux cures qui leur sont administrées par des bureaucrates qu'ils n'ont pas élus ou des élus qui ne défendent plus leurs intérêts;

Mais jusque-là, une interaction politiques-administrés était encore de mise. Avec la crise ukrainienne, on change de dimension :

- les postures martiales et le déploiement de troupes militaires aux frontières de l' Europe pour des " raisons (d'Etat) auxquelles la raison (citoyenne) échappe" ne se fait pas sans qu'un certain sentiment d'abandon ne s'empare du citoyen lambda:

- l'ingérence constante de Washington dans des affaires purement européennes, visible depuis le débat de la crise ukrainienne, ne manque pas de poser des questions angoissantes aux européens sur l'indépendance et l'identité des pilotes de l' UE;

- une BCE en passe d'opter pour un recours aux méthodes américaines d'assouplissement quantitatif décriées depuis 6 ans et dont on peut en effet constater aujourd'hui l'inefficacité, provoque inévitablement une forte suspicion;

- les manoeuvres employées pour accélérer la signature du fameux TTIP envers et contre tous les avis (consommateurs,défenseurs des libertés,patrons d'entreprises, etc..), achèvent de ranger les machinations du système dans la catégorie "trahison" des intérêts collectifs européens les plus évidents.

Non, la signature du TTIP n'est pas motivée par l'intérêt des européens

Attardons-nous quelques instants sur ce TTIP dont la Commission européenne prétend qu'il nous fera gagner 120 milliards d'activité économique suppplémentaire. La première remarque qui vient à l'esprit, c'est "comment la facilitation des échanges avec le marché atone de 250 millions de consommateurs américains au détriment de notre accès aux marchés multimilliadaires et en pleine expansion des émergents pourrait-elle être une bonne affaire ?". car le problème est là : nous voyons bien que le TTIP nous coupe des russes pour commencer, puis des BRICS qui resserrent leurs liens entre eux en réaction logique aux postures agressives de l'Occident.

Par ailleurs, les échanges commerciaux entre les Etats-Unis et l' Europe bénéficient déjà depuis longtemps de très faibles barrières douanières ( rarement plus de 3%). Ce n'est donc pas aux barrières tarifaires que s'attaque le TTIP mais aux protections légales, celles que l' Europe s'est construites pour protéger son marché de produits toxiques notamment. Depuis des décennnies, les européens se sont créé un marché notamment alimentaire répondant à des normes sanitaires très strictes réduisant le plus possible les OGM, les hormones, les produits chimiques en tous genres..normes que nous nous appliquons à nous-mêmes..et bien sûr aux produits d'importation.

C'est grâce à cette normalisation que les européens bénéficient de l'alimentation la plus contrôlée et la plus saine de la planète, que ces normes s'imposent au reste du monde entier, et que l' Europe s'est construit l'image justifiée d'un producteur de produits alimentaires de grande qualité s'exportant donc facilement . L'objectif du TTIP est donc simple : abaisser le niveau de normalisation pour le rendre compatible avec celui des Etats-Unis...La conséquence de cette dérégulation sera de rendre les produits US accessibles à notre marché, des produits inévitablement compétitifs en termes de prix compte tenu de leur moindre qualité, qui tireront à moyen terme vers le bas la qualité de la production alimentaire européenne et feront s'effondrer leur compétitivité qualitative...on comprend mieux pourquoi les patrons d'entreprise allemands, par exemple, se sont affichés contre le TTIP dès l'origine.

Objet des attaques contre le TTIP, l' ISDS ( Investor State Dispute Settlement) donne un avantage exorbitant aux entreprises sur les Etats en cas de litige. Côté européen, il y a encore peu de temps; on demandait à ce que cette clause soit tout simplement éliminée de l'accord mais, côté américain, il n'en était pas question. désormais, les européens se sont pliés et entreprennent de "convaincre" la société civile des bienfaits de l' ISDS dans le cadre d'une consultation/explication très transparente.

De nombreuses autres raisons mobilisent les associations de citoyens, de consommateurs et d'entrepreneurs contre le TTIP. Mais une caractéristque se dégage de la description précédente qui condamne en effet ce Traité, c'est qu'il apparait clairement comme un outil au service des exportations américaines avan toute chose. Obama, par ses tentatives de court-circuitage du Congrès via l'invention de mécanismes dits " fast-track" en dit en effet long sur le caractère vital de ce TTIP pour Washington, bien plus que pour l' Europe. On imagine d'ailleurs aisément les puissances à l'oeuvre derrière ce Traité, au premier rang desquels l'immense Monsanto. ( L'intérêt de cette organisation s'est exprimé par exemple lorsque, à la demande de Washington, ils ont accepté de réduire le lobbying intensif qu'ils exercent à Bruxelles..pour ne pas risquer de perturber les négociations...).

 

 

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